1.7.07 : L'Illustrateur du mois
Je suis l'"illustrateur du mois" sur Illu-station, un site internet dédié à l'illustration. Ce site présente le travail d'illustrateurs du monde entier grâce à des petites vignettes rangées par catégorie (livres, publicité, perso...).
La présence sur ce site est soumise à candidature, je leur ai envoyé une sélection de mes dessins, ils m'ont répondu un mois plus tard pour m'informer qu'ils retenaient mon profil et qu'ils me choisissaient pour être l'"illustrateur du mois".
L'"illustrateur du mois" apparaît sur la page d'accueil du site, doit répondre à une interview et répondre par le dessin à la devinette "qu'est-ce qui a des couettes, de grands yeux mais pas d'oreilles ?".
Tout est en ligne.
J'ai réfléchi un petit moment avant de répondre à la devinette. J'ai choisi d'ailleurs de ne pas y répondre, ou en tous cas de jouer avec la question : j'ai dessiné un sphinx (qui mythologiquement pose des énigmes) qui garde un temple (Illu-station). J'ai mis du temps à le dessiner. Il a fallu travailler beaucoup de détails puis la luminosité. En plus c'est une thématique qui m'est étrangère, la mythologie. Au final, je ne sais pas si c'est réussi sémantiquement, est-ce que les gens vont comprendre que je mets en abîme la question ? Je ne suis pas certain que tout le monde sache qu'un sphinx... Enfin, le résultat est un dessin assez original.
Pour l'interview, je la reproduis ci-dessous. C'est la première fois que je fais cet exercice. J'ai aimé dans le sens où ça oblige à formuler certaines choses qu'on n'a pas l'habitude de dire. Du coup, j'ai réalisé pas mal de choses sur moi, comme la formulation d'un style, les références artistiques dans lesquelles je me reconnais...
Le fait d'avoir été choisi illustrateur du mois sur l'un des seuls sites (sinon le seul) français d'illustration me fait du bien et me rassure. J'ai parfois l'impression que faire ce métier est une lubie : le travail est irrégulier, relativement rare... alors forcément je doute parfois de moi, de ma subsistance dans ce milieu... Même si c'est toujours le cas, avoir été reconnu de cette manière m'encourage à poursuivre. Comme je le dis dans l'interview "c'est le silence qui est atroce". Et maintenant il y a un peu de bruit.
Interview :
Comment décris-tu ton style ?
Je dirais qu'il est "sale", quoi que je dessine il y a toujours un côté brut. J'essaye de faire de cet aspect, parfois rebutant, un atout. Sinon j'aime les choses assez contrastées, souvent dans le même dessin il y a une zone de lumière très forte et une zone très sombre, une sorte de clair-obscur.
Quelles sont tes influences ?
Je pense que j'ai été influencé par les images du quotidien de mon enfance : couvertures de livres dans la bibliothèque de mes parents, pochettes de 33 tours de mon père... Pour les influences plus choisies j'aime beaucoup les peintres expressionnistes allemands et le mouvement de la Nouvelle Objectivité avec des gens comme Otto Dix. J'aime aussi Edward Hopper, le faux silence de ses toiles. La poésie urbaine de Jean-Baptiste Mondino ou Leos Carax...
Quel est ton support favori ?
Je travaille toujours avec le même support : pastel sec sur papier. Ce matériau me permet de tâtonner, de me tromper, comme c'est sec et très couvrant on peut corriger ses erreurs facilement et immédiatement. Et puis c'est un support très direct, vous avez au bout des doigts du pigment quasi brut, ainsi le rapport à la couleur est frontal.
Quels sont tes designers, illustrateurs et sites web préférés ?
Je ne connais pas grand monde dans le métier ! Hormis les dessinateurs de BD, peu de noms d'illustrateurs sont entrés dans la culture populaire, c'est un comble parce qu'ils sont pourtant placardés dans la rue et on les voit beaucoup sur les pages de magazines, mais on ne sait pas comment ils s'appellent et les medias ne s’intéressent pas à eux. J'aime énormément Guy Peellaert, je suis impressionné par Hanoch Piven, et appécie aussi Shawn Barber, Jorge Alderete ou Marie Bertrand. Côté web, désolé mais je n'ai rien vu d'exceptionnel.
Que préfères-tu illustrer ?
J'ai une petite préférence pour les couvertures de romans, il faut coller à une ambiance et pour ça il y a un travail d'immersion dans l'oeuvre que j'aime bien, comme un acteur qui s'approprie un rôle. Mais j'aime beaucoup aussi travailler sur des essais, là mon approche est très différente : il faut que je transmette l'idée directrice du livre, c'est un travail intellectuel et pas "affectif". C'est peut-être dans ce dernier contexte, quand l’image exprime une idée – tel la parole – qu’elle est la plus forte. En tous cas j'accueille tous les projets avec enthousiasme.
Quels travaux t'ont le plus satisfait ?
Je suis rarement satisfait. Et la satisfaction dépend aussi beaucoup de la réception du travail par le public. Dans cette mesure je suis assez content de la couverture de "L'Homme qui venait du passé" dont j'ai eu beaucoup de retours positifs, les gens la trouvent belle. Même chose pour l'illustration qui ouvre mon site internet. Quand j'ai des retours - quels qu'ils soient - je suis déjà satisfait. C'est le silence qui est atroce.
Quelle est ton actualité ?
En août Arc international sort une vitrine pour laquelle j'ai réalisé le décor. A la rentrée quelques bouquins dont j'ai fait la couverture sortent... Je suis sur Illu-station ! Sinon, de manière beaucoup plus banale, mon "actualité" quotidienne est racontée et dessinée sur mon blog.
As-tu des projets en ce qui concerne l'avenir ?
C'est loin l'avenir... Non je ne fais pas de plan sur la comète car je suis rivé sur le présent, c'est difficile de vivre de ce métier et j'essaye de le faire. Alors j'ai la tête dans le guidon. Comme projet, mais à court terme, j'ai celui de faire une BD, je ne sais pas encore trop ce que j'y raconterai mais des images viennent petit à petit, j'attends d'avoir une belle vue d'ensemble pour commencer.