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© Julien Chabot.
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11.6.08 : Multidimensionnel
 

Depuis longtemps je croise un type dans le quartier. Il habite dans ma rue, il sort plusieurs fois par jour, avec son chien, je le vois surtout de ma fenêtre. Il est assez âgé. Parfois je le croise sur le boulevard, assis sur un banc. Je le vois régulièrement, il fait partie de mon quotidien, nous nous regardons mais ne nous saluons pas, je ne connais rien de lui.
Et aujourd’hui, en sortant de chez moi, il était là, juste à côté de ma porte d’immeuble, il regardait je ne sais quoi plus haut dans la rue. Nous nous sommes retrouvés face à face. Alors nous nous sommes dit "bonjour".
C’était la première fois que je le voyais de si près, j’ai vu qu’il avait des yeux bleus, une certaine douceur dans le regard, ce que je ne soupçonnais pas. Je le trouvais auparavant plutôt rigide et sévère. J’ai vu ses traits en détails, son air gêné, entendu sa voix. Une nouvelle dimension visuelle s’est présentée à moi.
 
Le même effet qu’au théâtre, quand je vois un comédien de mon fauteuil pendant deux heures, une distance immuable nous sépare, je reçois son physique tel quel, je l’assimile, il peut y avoir un éclairage ou un maquillage donné, peu importe, le physique du comédien naît en moi avec tous ces paramètres. Et si par hasard je le croise après, dans le hall du théâtre, à la sortie, dans les coulisses, je suis toujours surpris de la différence entre ce que j’imaginais de lui "de loin" et ce que je perçois "de près", pas un fossé, mais c’est comme si j’entrais dans un nouveau cercle de perceptions.
 
Chaque distance a peut-être sa propre émotion, l’homme serait alors inépuisable en quelque sorte si l’on changeait perpétuellement notre point de vue sur lui.
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