7.8.10 : Pendant ce temps-là, à quelques milliers de kilomètres
Dans chaque ville, dans chaque village, de nouvelles traces de vie. À Cagliari, une rue africaine avec les hommes qui attendent sur les marches. Un centre historique, des monuments, une banlieue. Des gens, des gens.
Dans le petit village de Jerzu, ce vieux et cette veuve, cités dans le précédent texte. Des gens, des gens.
Une île à la culture ancestrale, à l’histoire ancestrale, une organisation. Comme partout. Par exemple, l’artisanat typique de la Sardaigne c’est le couteau. Le couteau sarde, fruit de longues traditions et certainement de longues explications.
Ces organisations qui vivent très bien sans moi, que je découvre mais si je ne les découvrais pas, elles auraient tout aussi lieu. Ces visages que je croise existeraient, pas pour moi mais pour d’autres.
La relativité du monde.
Partout des coeurs qui battent et le mien qui bat pour lui mais qui jamais ne battra en même temps que tous.
Ces visages sardes, réputés pour regarder dans les yeux, et c’est vrai. Dans ce marché, on croise des vieilles, des jeunes, des hommes, des femmes et on est frappé par le fait qu’ils te regardent quand tu les croises. Dans les yeux. C’est agréable, c’est plus humain.
Nous nous sommes rencontrés. Mais ces autres regards, loin là-bas où je n’irai pas, je ne les verrai jamais. Et les sites touristiques continueront d’avoir une existence et un intérêt profond sans moi. Je resterai toujours étranger à certains étrangers.
Cette serveuse qui m’aborde à Sant’Antioco pour me présenter son menu, j’ai un peu pitié pour elle du manque de client de son restaurant, je compatis, mais si je n’avais pas été là et pas vu cette scène, elle chercherait quand même à remplir son resto, à souffrir peut-être de ce difficile métier, et je n’y pourrais rien, et je ne le saurais pas, et je n’éprouverais rien à son égard, et n’éprouverais rien à l’égard de la Sardaigne.
Du moment où on voyage, on prend part à la vie, on vit les choses.
Même si on sait que la vie est là : aux Seychelles, en Australie, c’est abstrait, il n’y a pas de sentiments, de vie justement. Même avec la télé, même avec internet.
Le meilleur média qui soit, c’est soi-même.